Le Contrat (un ancien RP posté ici pour rappel ^^)

[LuneRousse]

Les cuisines de l’auberge firent monter son personnel dans les chambres pour les petits déjeuners. Le dernier de la longue colonne n’en n’eut pas le temps, contraint d’attendre qu’on le libère d’un sac de bure dans les réserves des lieux.
Abred revêtit l’uniforme et amena les denrées matinales jusqu’à la chambre de la dignitaire Born In The TearDrop.

Sonja ne prêtait guère attention à celui qui la servait et l’assassin prit un soin particulier à respecter le protocole des gestes qu’il avait étudié plusieurs jours en séjournant chez eux.

Il fit ensuite quelques pas en arrière et s’assura que Sonja mette à ces lèvres le thé chaud qu’on lui avait servi.

Quelques instants plus tard, le trouble et la confusion visuelle pris le dessus dans le regard de l’humaine.
Les sons s’amplifiaient et l’espace se dilatait autour d’elle.

Abred s’approcha à quelques centimètres de son visage et lui posa sa lame à la racine de ses cheveux. Il arrêta son geste et lui chuchota dans l’oreille…

… Le contrat est clair, mon client ne souhaite plus votre mort.
Alors je laisse au poison faire le choix de votre survie.

Il coupa une mèche de ses cheveux, et tandis qu’il prenait soin de la positionner correctement devant son plateau, il jeta une pluie de pétales de Rose Noire sur la victime avant de s’éclipser.


[Sonja]

Sonja ne s'était pas méfiée de ce serviteur venu lui apporter le petit déjeuner. A sa décharge, elle avait la tête ailleurs ces temps-ci et elle n'aurait pas dû baisser sa garde. Et lorsqu'elle réalisa qui elle avait en face d'elle, le terrible assassin qu'elle connaissait bien, son sang se glaça dans ses veines, mais ce n'était pas encore l'effet du poison. Et il était trop tard.
En un éclair, elle se remémora la promesse que LuneRousse lui avait faite : il la tuerait et prendrait une mèche de ses cheveux pour les offrir en présent à Naelynn dont elle avait causé la mort en déjouant une embuscade des Sylves sur son clan. C'était il y a des mois…une éternité. Elle avait un peu oublié cette histoire mais apparemment pas l'assassin elfe.
Les yeux dilatés par l'horreur, elle sentit les effets rapides du poison sur son corps et se retrouva quasiment paralysée, à la merci de la lame de l'elfe. Lorsqu'il partit sans la tuer, cela ne la rassura nullement, elle était déjà aux portes de la mort, c'en était fini de sa vie.
Avec un effort surhumain, elle se reprit et chassa la peur qui s'était instillée en elle. Elle n'était pas encore morte et tant qu'elle aurait encore un souffle de vie, elle lutterait de toutes ses forces. Ne serait-ce que pour avoir le plaisir de déjouer les plans de cette vile créature ! Elle força son corps à bouger et tenta de se lever pour aller chercher de l'aide. Ses efforts furent vains, elle s'effondra au sol, la vue trouble, le souffle déjà rauque de l'agonie s'échappant de ses lèvres desséchées. Mais son esprit n'avait lui pas encore été atteint et elle comprenait ce qui allait lui arriver : elle perdrait conscience en tout dernier lieu, consciente jusqu'au bout de la mort qui grignotait sans espoir de retour chacun de ses organes, de ses nerfs. Elle allait rester là des heures à agoniser dans sa prison de chair. La pire des morts.
Tentant d'économiser le peu de souffle qui lui restait, elle fit le point sur la situation peu brillante dans laquelle elle se trouvait. Au mieux, il lui restait moins de deux heures à vivre. Il était très tôt et il y avait peu de chance que quelqu'un s'inquiète de savoir s'il lui était arrivé quelque chose. Elle ne pouvait pas crier, elle pouvait à peine bouger. Elle se rappela soudain le cadeau que son ami Liptikos lui avait offert récemment. Elle eut une pensée de gratitude pour l'ex-Sylve devenu humain et un de ses frères d'arme, cela allait lui faire gagner un peu de temps. Avec un effort surhumain, elle déplaça sa main vers une des poches de sa robe. Des gouttes de sueur perlèrent sur son front à cause de l'effort. Elle réussit à saisir la petite fiole qui s'y trouvait et à la ramener jusqu'à ses lèvres. Le petit bouchon de liège sauta facilement et elle but le liquide épais qui s'y trouvait. Une potion de constitution, pour gagner une heure de répit. A peine…
Si au moins elle avait eu une potion sous la main ! Mais la veille, elle avait vidé ses réserves pour sauver son chef et elle avait remis au lendemain la reconstitution de ses stocks. Décidément se dit-elle en souriant intérieurement, elle avait cherché les ennuis.
Soudain, un nouveau spasme la parcourut, son corps se raidit puis retomba sur le sol, la laissant encore plus mal en point que précédemment. Le poison progressait, d'ici une heure, elle serait morte, quelle que soit l'énergie qu'elle y mettrait pour lutter, elle n'avait plus de recours. Elle ferma les yeux. C'était la fin.
Et en cette fin de sa courte vie, ses pensées se tournèrent naturellement vers la personne la plus chère à son cœur. Stouf, son Maître, celui qui avait guidé ses premiers pas, qui l'avait armée et protégée, qui l'avait formée. Stouf, plus qu'un mentor, qui était devenu un ami puis un confident. L'ami qui avait plongé pour la ramener à la surface quand elle avait sombré dans des abîmes de désespoir, l'ami dont elle avait percé l'armure à force de volonté, l'ami avec qui elle avait traversé tant d'épreuves ces derniers mois qu'il en était devenu indispensable à sa vie même. Il était devenu tout…son tout. Et elle ne le reverrait jamais car elle allait mourir empoisonnée.
Une larme perla au coin de son œil et coula sur sa joue déjà froide. Les battements de son cœur ralentirent progressivement, sa respiration devint très difficile, sa vue se brouilla, elle comptait les secondes qui la séparaient du vide infini, de l'obscurité, du néant. Encore un battement… encore un petit battement… un tout petit battement…de rien du tout… son dernier souffle passa entre ses lèvres marbrées.
Elle ferma définitivement les yeux. Stouf…
Une grande chaleur l'envahit soudain, parcourut tout son corps, puis une force incommensurable, une force de vie la souleva. Un choc dans sa poitrine, un cœur qui bat, une grande inspiration, comme une noyée revenant à la vie. Elle toussa, voulut se débattre mais deux bras puissants la retinrent. Elle ouvrit les yeux et rencontra le visage inquiet de celui pour qui avait été sa dernière pensée. Il la serra contre lui.

"Je te jure que je tuerai ce vil", gronda-t-il.